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27 May

René Apallec

Publié par Éric Babaud  - Catégories :  #découpage, #exposition, #dessin, #peinture

Gueule cassée - René Apallec

Gueule cassée - René Apallec

René Apallec, «le canular qui fonctionne»

28 des quelque 180 «gueules cassées» de René Apallec seront exposées chez Jean-Jacques Valenkak du 19 au 28 septembre. René Apallec, dont on sait peu de chose, serait un artiste né quelque part durant la dernière décennie du XIXe siècle, qui a décidé de rendre hommage aux véritables gueules cassées de la Grande Guerre, en défigurant des généraux et des maréchaux à travers ses collages. Il leur rend justice en somme. Côté technique, un scalpel, de la colle «c'est tout. Et peut-être une loupe». L'artiste effectue ses collages des gueules cassées avec une seule image, qu'il découpe et rassemble, rapprochant des yeux, déformant une mâchoire, enlevant un nez ou une oreille, ou les deux. En réalité, René Apallec n'est autre qu'Hervé Laplace, artiste toulousain. Il s'agit d'un personnage qu'il a inventé, et dont il a inventé l'histoire. «Je me retrouve sur des sites spécialisés sur la Grande Guerre, à côté d'Otto Dix, ou sur le blog du magazine Première» s'amuse-t-il. Si l'histoire prête à sourire, l'affaire est sérieuse. Il a exposé à San Francisco cet été et sera au Royal Albert Museum début 2015. Pour Jean-Jacques Valenkak, «les gens vont continuer à en parler, il faut le voir, il faut venir voir l'exposition». À bon entendeur.

Gueule cassée - René Apallec

Gueule cassée - René Apallec

De nombreux artistes ont créé pour dénoncer et exorciser la boucherie de la Première Guerre Mondiale. En raison des stigmates laissés sur les visages et les esprits des soldats survivants, des artistes ont souvent représenté ceux qu’on appelle les “gueules cassées”. Ainsi, les allemands Otto Dix ou George Grosz ont marqué les esprits par des œuvres expressionnistes et brutales. Un artiste français a fait ce même travail : il s’appelait René Apallec.

René Apallec (1898-1968) est né en Normandie.  Pendant la guerre 14-18, il occupe le poste d’infirmier dans un des premiers services de chirurgie maxillofaciale. A-t-il assisté les médecins précurseurs tels que Dufourmentel ou Morestin ? L’histoire ne le dit pas. Mais,  nous savons qu’il a alors commencé une série quasi thérapeutique de collages “les gueules cassées” qui n’était pas destinée à être exposée.

Gueule cassée - René Apallec

Gueule cassée - René Apallec

En 2007, est redécouvert de façon fortuite le “fonds Apallec” dans un grenier d’une ancienne maison à Toulouse. On y découvre près de 300 gueules cassées saisissantes mais également d’autres séries de collages, toutes réalisées dans les années 20 et 30 :  “Les Perruques” qui effacent les visages, “Les Oisifs” qui mettent en scène des personnages à têtes d’oiseaux poursuivis et chassés ou bien “Les vues de l’arrière” qui décrivent les ravages de la guerre sur la vie civile.

Depuis cette découverte, de nombreuses personnes se sont intéressées à son œuvre. Aujourd’hui, les collages de René Apallec ont conquis les historiens, les collectionneurs, les médias et même les collégiens qui s’en inspirent pour portraitiser des personnalités actuelles.

L’universitaire Renaud Bouchet, Maître de conférences en histoire de l’art contemporain à l’université du Mans, fait référence sur le collagiste Normand. Dans son article, « René Apallec, chirurgien plasticien sur le papier », il considère qu’il s’agit de “l’histoire d’une découverte dont rêvent, entre autres, les historiens de l’art”.

Progressivement, on (re)découvre les liens entre le collagiste Normand et les artistes de son époque. La relation la plus documentée est certainement celle avec l’artiste Max Ernst. Alors que la série des oisifs de René Apallec semble remonter aux années 20, le livre d’artiste « une semaine de bonté » de Max Ernst n’est édité qu’en 1934. De là à imaginer que le Normand a pu influencer le maître !

Gueule cassée - René Apallec

Gueule cassée - René Apallec

L’histoire de René Apallec est belle… mais est-elle véridique ?

En réalité, les collages de René Apallec ainsi que l’histoire de sa vie sont deux pièces d’une même œuvre, celle du collagiste contemporain Hervé Laplace. Il chine les livres et journaux d’époque, il découpe et colle et raconte l’histoire. Apallec est d’ailleurs l’anagramme de son nom, Laplace.

En 2013, le magazine Hey! Modern Art & pop culture  dirigé par Anne Richard consacre à René Apallec un très bel article.

Mais c’est en 2015 que la consécration arrive. En effet, le Royal Albert Memorial Museum le contacte pour un projet d’exposition sur les visages défigurés de la première guerre mondiale  “Faces of conflict”.

les collages de Hervé Laplace se retrouvent auprès des œuvres d’Otto Dix ou de George Grosz ainsi que d’artistes contemporains majeurs comme Paddy Hartley ou Eleanor Crook. Un collage de René Apallec est même choisi pour l’affiche.

Avec René Apallec, Hervé Laplace revendique une démarche pacifiste. Si “casser la gueule aux généraux” de la grande guerre peut sembler les juger, l’artiste s’en défend : “Je n’ai rien contre ces généraux, c’est l’histoire qui va les juger, pas moi… ”  

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